La médiation de la consommation, paradoxe d’un nouveau terrain d’expression juridique

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Fini le « Y’a pas de justice, désormais c’est « Y’a la médiation! »

Le 9 juillet, les litiges de la consommation en solde de procédure ? L’accès à leur règlement amiable doit être garanti sans recours à un avocat ou autre tiers, mais sans que ce passage soit obligé pour le consommateur qui pourra continuer d’aller directement en justice. Etonnante liberté pour qui choisirait d’aller se soumettre plutôt que d’aller discuter. La conciliation devant le tribunal d’instance offre une autre possibilité – déjà existante, mais désormais quel que soit le montant des enjeux, les consommateurs pourront solliciter ce nouveau dispositif amiable dont l’objectif est d’aller plus vite que le système judiciaire.

En fait, il ne s’agit pas vraiment d’une discussion, puisque le médiateur fait du traitement de dossier, spécialiste du domaine technique et juridique du litige. Sa conception de la solution est donc un préjugement. Ce type de médiateur est en fait un conciliateur. Avec de telle confusion entre médiateur et conciliateur, il se pourrait bien que le consommateur ne s’y retrouve pas facilement s’il doit recourir un autre jour à un médiateur dans sa vie professionnelle, là où le médiateur aide à décider. Mais entre l’avocat général et l’avocat de la partie civile ou de la défense, de l’ange ou du diable, tout le monde s’y est fait. pour les médiateurs, la différence se fera aussi en fonction des contexte.

La directive européenne du 21 mai 2013 prévoit qu’avant le 9 juillet 2015 tous les secteurs devront être dotés d’un recours à la médiation : le bâtiment et la construction, l’artisanat et l’hôtellerie… Carole Delga, secrétaire d’État chargée du Commerce, de l’Artisanat et de la Consommation l’a affirmé : «Un projet de décret et d’ordonnance vient d’être adressé au Conseil d’État. Il devrait être publié début juillet».

La déjudiciarisation des litiges sous l’emprise du juridisme

La médiation devient un nouveau terrain d’expression juridique. Les textes pleuvent et viennent donner une nouvelle conception du droit, en même temps que les juristes s’enfoncent dans une nouvelle jungle de textes qui vient polluer la compréhension de l’accès à la résolution des différends. Tout un art juridique. Mais la volonté est affirmée de simplifier au maximum de sorte que les consommateurs n’aient pas besoin de recourir à la justice… ni à l’action de groupe !

Le cadre légal de cette médiation pour les différends liés à la consommation sera-t-il opérationnel une fois posé ? Les spécialistes de la médiation bancaire se sont déjà montrés optimistes :  « La transposition de la directive pourrait être le moyen de rationaliser le dispositif actuel en harmonisant les pratiques et les différents systèmes de médiation. En effet, la directive a posé des exigences fortes quant à l’accès des consommateurs à la médiation ainsi qu’à l’indépendance, la compétence et l’impartialité des médiateurs. Elle impose le respect du principe de transparence et prévoit que les médiateurs soient listés et évalués, notamment au regard de leur formation, par une ou plusieurs autorités compétentes désignées par chaque État membre. »

Quel médiateur ?

Dès 2016, l’entreprise concernée par un litige aura pour obligation de donner le contact d’un médiateur dans son domaine d’activité, sans que le consommateur soit contraint d’y recourir. En effet, le consommateur aura le choix entre le recours à la justice, l’action de groupe et le recours à un médiateur, qui pourra aussi être un médiateur privé.

« La médiation privée sera peut-être la solution la moins contraignante pour l’entreprise, en évitant les actions de groupe et surtout pour le consommateur, c’est du gagnant-gagnant, explique un membre du cabinet. » rapporte Ouest-France du 18 mai.

A l’automne, les médiateurs (candidats ou déjà en charge d’un secteur ou d’une entreprise) pourront adresser leur dossier à une « autorité unique » d’évaluation et de contrôle de la médiation. On peut craindre que ces nouveaux jobs, comme celui des systèmes de médiation institutionnelle, aient à leur tête quelques énarques en perdition. La France « notifiera à la Commission européenne la première liste des médiateurs de la consommation au début de l’année 2016 » (Notre Temps – 19 mai).

Rémunération du médiateur

Le médiateur sera rémunéré par la fédération qu’il représente, mais afin d’éviter tout conflit d’intérêt son indépendance sera garantie.

Durée de la fonction

La durée de son mandat sera d’au moins 3 ans.

Liens externes :

Encore des textes à faire entrer dans la prochaine édition du code de la médiation et du médiateur professionnel.