A l’origine d’une nouvelle approche pédagogique
Lorsqu’en 1987, la norme ISO 9001 allait faire son apparition dans le paysage des garanties qualité concernant les produits et les services, j’ai attiré l’attention des personnes de l’AFNOR sur les conditions de travail de ceux qui étaient non pas seulement concernés, mais pleinement impliqués. Ma préconisation s’est trouvée reléguée à la simple tentative de convaincre : l’idée que j’avançais de « qualité relationnelle » a été considérée comme incongrue. A cette époque, le vocabulaire « qualiticien » était réservé à ce qui pouvait se mesurer et la relation n’avait rien de mesurable. Il m’a fallu une quinzaine d’années pour parvenir à structurer le référentiel de la dégradation relationnelle et encore une dizaine d’années pour clarifier de manière définitive les invariants de la qualité relationnelle.
Une modélisation rationnelle
Pour cela, je me suis fondé sur une approche qui m’a permis de concevoir un modèle, le modèle systémique des interactions en communication – SIC. Je me suis inspiré de Pythagore, Descartes, Pascal, Wiener, et de réflexions sur le fonctionnement cérébral. Les neurosciences balbutient encore, mais ce champ d’investigation est fertile en idées nouvelles. C’est ainsi dans le courant des années 2010 que j’ai clarifié Ce Qui Fait la qualité relationnelle, Ce Que Fait la qualité relationnelle et Ceux Qui Font la qualité relationnelle, indissociables du modèle SIC générateur des 3CQF.
Avec ce référentiel, j’ai conçu des programmes de formation et désormais l’idée se propage.
Des techniques centrées sur la qualité relationnelle
Les techniques sont utilisées dans un grand nombre de contextes. Elles sont opérationnelles dans la résolution des conflits habituellement judiciarisés, dans la régulation des tensions, l’apaisement des affrontements et les situations de pénibilité relationnelle. Mais attention, elles ne sont pas que tournées vers autrui. Vous avez remarqué que parfois vous vous traitez comme un autre ? Vous vous tutoyez, vous parlez de vous en « on », vous utilisez le « nous » en vous fusionnant avec autrui… Ainsi, vous pouvez aisément comprendre que la qualité relationnelle commence par soi. L’altérité est à ce point de départ, cet ancrage intime. Et vous pouvez tout aussi aisément concevoir que tout cela s’apprend autant que cela s’enseigne.
Une instrumentation scientifique
C’est une nouvelle matière qui ne pouvait être conçu que dans un contexte culturel où l’individu est reconnu en tant que tel, avec ses droits fondamentaux et sa perfectibilité constante. J’ai fait l’inventaire des techniques le plus opérationnelles, celles qui, ensemble ou séparément, apportent les résultats les plus probants, dont la pérennité constatable. J’en ai fait l’enseignement de la profession de médiateur et conçu ainsi l’ingénierie relationnelle à laquelle j’ai ajouté la notion de systémique en 2024.
Un enseignement tout terrain
Ces techniques sont enseignées dans les entreprises privées, les administrations, dans la fonction publique et les environnements de santé, les hôpitaux et les cliniques, mais aussi spécifiquement dans les cursus spécialisés dans la formation des médiateurs professionnels et celle des référents médiation professionnelle et qualité relationnelle. Ceux-là interviennent au sein des organisations où ils sont salariés. Ils prescrivent des médiations et animent des formations d’initiation à la qualité relationnelle. Les méthodes telles que l’altérocentrage et la restitution de sens, par exemple, permettent d’accompagner chacun dans l’identification précise des schémas relationnels perturbateurs et des croyances limitantes, non pour les transformer mais pour les dépasser en les évacuant ou en les régulant.
La vie scolaire pour une meilleure appropriation en société
La vie scolaire est l’un des espaces où s’élaborent les dynamiques relationnelles sociales de chacun. Au-delà des apprentissages académiques, elle confronte élèves, enseignants, personnels administratifs et parents à des interactions complexes parfois sources de tensions, de stress, voire de rupture scolaire. Ces situations se conjuguent à toutes les autres et, compte tenu de l’objectif de l’environnement scolaire, méritent une attention méthodologique particulière.
La vie scolaire reflète ainsi, et cristallise parfois, les différentes formes d’obstacles cognitifs qui limitent la qualité relationnelle : incompréhensions, conflits ouverts, harcèlement, décrochage affectif. Selon l’Ingénierie Systémique Relationnelle® (ISR) développée par les médiateurs professionnels habilités, et l’approche méthodologique qui se valide à l’aune des théories sur le fonctionnement cérébral, ces phénomènes résultent principalement de trois défauts cognitifs : l’adversité, le déficit d’altérité et le manque de rationalité. Ces dysfonctionnements sont autant d’occasions d’ajustements, et ouvrent par conséquent des perspectives qui nécessitent des implications pour transformer les pratiques relationnelles. Encore une fois, la prise en compte des neurosciences dans les approches relationnelles, qu’elles soient pédagogiques, intimes ou sociales, ouvrent des perspectives importantes. Dans tous les cas, la rigueur peut être au rendez-vous de manière utile, agréable et tout à fait esthétique.
Un processus et un dispositif promoteurs
Ainsi, pour améliorer la qualité relationnelle en milieu scolaire, il convient d’adopter une démarche structurée :
- Régulation cognitive et ajustement immédiat : permettre aux élèves et enseignants de s’approprier un référentiel sur les modes de pensée, lié aux neurosciences, afin d’ajuster en temps réel leurs réactions et d’éviter les dynamiques conflictuelles ou impulsives.
- Prévention par une pédagogie ajustative : introduire, dès les premiers cycles d’apprentissage, des activités pédagogiques qui visent à identifier les réactions affectives et émotionnelles pour favoriser leur régulation par une pensée réflexive ouverte et structurée.
- Formation continue des équipes éducatives : déployer des formations régulières fondées sur l’ISR, destinées à outiller les enseignants et personnels administratifs en compétences relationnelles précises, afin de favoriser l’émergence d’une qualité relationnelle durable au sein des établissements.
- Mise en place de dispositif de médiation internalisée (LABEL ENTENTE) : entretenir la qualité relationnelle et permettre à chaque personne de pouvoir recourir au dispositif dans la perspective de résoudre un différend ou de restaurer ou promouvoir la qualité relationnelle.
Cette approche méthodologique n’a rien de radicale, mais elle devient une compétence essentielle tout au long de la vie personnelle et professionnelle. Elle s’inscrit à la fois dans la logique de l’adaptation circonstancielle et celle de l’investissement durable. Elle est progressive et suit les principes de l’appropriation des savoir-faire et savoir-être, avec les avantages de cohérences de l’application en soi et des effets constructifs avec autrui. Elle implique la mise en œuvre de la conscience, de l’interactivité et de l’entretien constant des compétences acquises pour un savoir s’ajuster dans les accompagnements exigeants des rapports du monde pédagogique.
Elle est dans une logique ternaire qui permet de clarifier ce qui fait, ce que fait et ceux qui font l’instruction et l’éducation, pour favoriser l’harmonisation personnelle et l’équilibre relationnelle avec autrui dans une perspective globale de satisfaction. Ainsi, vous pouvez faire de chaque interaction éducative une opportunité de croissance et de réussite pour tous.
Ressources :
- Pratique de la médiation professionnelle, ESF Éditeur
- Dictionnaire encyclopédique de la médiation, ESF Éditeur
- Dispositif pédagogique www.epmn.fr
