Ethique et déontologie en médiation, l’indépendance n’est pas l’impartialité, pour les nuls

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Pour une différence entre autorité et intérêts et enjeux

Concernant la deuxième confusion, il me faut revenir sur l’impartialité. Celle-ci comporte clairement sa signification : ne pas prendre parti. Mais ce qui est évident lorsque c’est dit ne l’est pas pour tout le monde dans son coin. De quoi s’agit-il ? Il ne s’agit pas d’obéir à l’une des parties, mais de voir des intérêts communs avec soi ou en soi. La partialité implique d’avoir les mêmes intérêts ; c’est être de parti lié, ce qui peut être le cas sur le plan matériel, mais aussi plus intimement sur des questions de valeurs morales. Ainsi, donc, rien à voir avec le fait d’être soumis.

On peut être de parti pris tout en n’étant pas en lien de subordination, soit indépendant et non impartial. Et cette posture est contraire à celle que l’on peut concevoir d’un médiateur professionnel.

La distanciation qui s’impose à un médiateur professionnel exige de lui qu’il développe un processus et utilise des savoirs faire qui lui permettent d’exercer par de là des échos d’intérêts et d’enjeux matériels ou moraux qui pourraient le lier à une partie en conflit. On verra même un peu plus loin que les techniques utilisées constituent une garantie supplémentaire dans sa distanciation, et par conséquent son impartialité.

Etre impartial, c’est donc une posture relative aux enjeux et aux intérêts. C’est par exemple être intéressé par le résultat qui pourrait être dans l’accord des parties, autre que celui que les parties trouvent un accord satisfaisant pour toutes.

Prendre parti pour une personne ne signifie pas de lui faire allégeance, c’est être son allié dans une circonstance. Mais le médiateur qui opérerait comme cela ne serait-il pas démasqué par les parties ? Sa crédibilité serait immédiatement mise à mal et le processus ne pourrait pas se poursuivre, à moins d’avoir des protagonistes dont la capacité de réflexion les empêcherait de prendre des décisions. C’est encore faire fi du fait qu’en médiation professionnelle, les personnes ont le temps de réfléchir et que personne n’est pressé d’enfermer l’autre dans un accord qu’il ne pourra tenir.

Un médiateur qui obtient un mandat de vente d’une propriété auprès de l’une des parties alors que l’un des enjeux du différend porte précisément sur le montant de la vente du bien ne saurait être médiateur professionnel. Il transgresse là le principe d’impartialité.

Un médiateur qui ne parvient pas à maintenir sa posture de distanciation et constate qu’il ne peut rester impartial, ce qui le conduirait à mettre un terme à la médiation pour des raisons morales, ce médiateur doit arrêter sa mission et, sans commentaire, confier la situation conflictuelle à un de ses confrères. S’il poursuit sa mission et influence les parties, il transgresse le principe d’impartialité. Si, de surcroît, il conduit les protagonistes à s’en remettre à un tiers pour arbitrage, il transgresse le principe d’indépendance.

Ainsi, clairement, l’indépendance est associée au rapport à l’autorité et de servitude, tandis que l’impartialité est liée aux valeurs morales et matérielles. Ce n’est donc pas de la même posture dont il s’agit, et les deux contribuent à définir la distanciation. Mais ce n’est pas suffisant, parce qu’une autre confusion est faite.

Dossier sur l’éthique et la déontologie en médiation, pour les nuls

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