Les conflits persistent

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Orages d’étés, les éclairs ont donné des couleurs bleues au ciel, refroidissant le jaune de l’éclairage public. Une coulée de lumière, tel le sang, rouge, de la vie dans les artères.

Après ces derniers mois où des guerres lointaines ont à peine perturbé les vacances d’été, l’automne arrive avec des conflits toujours aussi violents… Cet article est une tribune, un parti pris, celui de la qualité relationnelle. Un médiateur professionnel ne peut, avec la posture qui est la sienne, rester indifférent aux conflits qui émaillent les informations tous les jours. Il est pourtant possible de passer d’un paradigme guerrier à un paradigme relationnel. Différencier l’objet de sa motivation et la personne qui fait obstacle. Se battre pour ses idéaux et se battre contre un adversaire ont les mêmes résultats : la bataille (voire la mort). Je défends ici ce que d’aucuns considéreront comme une utopie et que je considère être une autre alternative à la vie en société.

Palestine-Israël

L’opération bordure protectrice a fait de nombreux morts, le conflit dure depuis des années.

il y a trois ans déjà

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Irak

Une faction porte atteinte à l’intégrité des autres factions en présence. De toute part les messages de soutiens aux chrétiens d’orient affluent, ils ont une histoire de 2000 ans en Irak. D’autres minorités d’aujourd’hui, hier majorités et demain disparues meurent sous les coups de l’adversité, à grand renfort d’armes des pays qui voient en ce pays, en cette situation et en ces richesses un enjeu de pouvoir. La France, les USA, l’Europe prennent position et participent à ce conflit.

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Ukraine

Le théâtre, ou le terrain de jeu d’un dictateur qui joue aux soldats mais qui ne joue pas seul, la mort frappe aveuglément, civils, engagés volontaires, engagés enragés, engagés pour survivre. Des avions violent l’espace militaire Ukrainien, des drones russes aussi. Un convoi humanitaire est bloqué en attendant d’être inspecté par la Croix Rouge, déjà l’Ukraine accuse les Russes d’avoir fait entrer sur leur territoire des lance-roquettes.

262 véhicules russes en partance pour Lougansk acheminent de l’aide humanitaire selon les russes, suspectés de participer à un déploiement de forces armées russes en territoire Ukrainien.

2600 morts ont été recensés fin août, Vladimir Poutine demande ce jour-là un cordon humanitaire pour les troupes ukrainiennes encerclées à Kiev

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Ebola

Les soldas contiennent des populations qui ne peuvent qu’attendre le résultat de leur guerre intérieur contre le virus, « on ne fait rien pour nous, mais en allant aux usa on aura peut être une chance »

Ebola fait peur, fait souffrir, fait mourir.

La crainte pour sa propre survie incite les personnes contaminées ou suspectées d’être contaminées ou craignant d’avoir été contaminées à agir en mode survie. Action – réaction. La raison a tort quand la survie reptilienne prend le dessus. Qui pourrait les condamner de vouloir vivre.

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USA

A Fergusson dans le Missouri, l’adversité transforme une arrestation en émeutes sur fond de conflit racial.

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France

Violence conjugale supposée qui tourne au bowling

Un agriculteur suspecté d’avoir commis des violences conjugales d’après le récit de sa femme a été interpelé par un escadron de gendarmerie (15 militaires) après que l’agricultreur ait décidé d’utiliser son engin agricole pour se défendre contre les véhicules de gendarmerie à sa portée. Deux gendarmes blessés, l’agriculteur semble prendre conscience petit à petit de la portée de ses actes

Calais, domination pour le passage

Plusieurs rixes entre migrants ont éclaté en août pour le contrôle des zones de passage.

*Les résultats de recherche évoluent dans le temps et sont sous la responsabilité de leurs auteurs (il est conseillé de croiser les informations afin de ne pas tirer de conclusions hâtives)

Que faire, que dire, que penser.

L’ordre logique est d’ailleurs tout autre.

Les faits sont là.

Sans être au cœur de tous ces événements il est impossible de tirer de conclusion sur la paternité du conflit ou sur les solutions à apporter. Que peut on faire, dire ou penser de ceci.

Les conflits sont la conséquence d’enjeux divergents, de points de vue hermétiques, de maladresse dans la réalisation de ce qui apparaît être la meilleure solution de son point de vue.

Le nombre de blessés ou de morts change t’il les faits, tenter de gagner des places dans une file en marchant sur les autres pour survivre change t’il le fait que la situation est difficile. Si spectaculaire que soit une situation, le fait ne doit pas céder sa place au spectaculaire. La beauté d’un mot ne doit pas faire oublier la vérité qui le sous tend.

La photo parfaitement réalisée et artistique d’un corps mort ne change pas la réalité, c’est le corps d’un mort.

La violence, conséquence d’une peur pour sa survie, ne définit pas les personnes qui y ont recours.

Enlever le risque vital de l’équation, ou le sentiment de risque vital, et la violence disparaît.

Reconnaître les personnes, dans ce qu’elles sont.

Se sentir exister. Pouvoir dire JE, sans avoir besoin de rajouter ce qui est déjà implicite à ce JE, Descartes ne m’en voudra pas de ce raccourci, d’autant qu’il est déjà employé lors des formations de médiateurs professionnels et lors des formations Stratégies et Interactions en communication à l’EPMN.

« JE » est reconnu, je… existe. Ce retour lui permet de comprendre qu’il existe pour nous.

L’été de tous les conflits, les conflits en été, il était un conflit.

Un conflit répond aux mêmes composantes, suit la même dynamique relationnelle, il en résulte les mêmes décisions.

En adversité, en conflit, en opposition, en guerre, les possibilités sont violentes, de nature à rendre durable le conflit.

En altérité, sous l’emprise de la raison, les possibilités ont pour objet de rendre durable l’accord libre entre les parties.

Le contexte économique pourrait passer pour le responsable de ces conflits.

J’ai entendu un lundi matin que pour qu’il y ait reprise économique il y a 3 possibilités : l’inflation, la déflation ou la guerre. (Jaques Attali sur BFM TV dans une interview avec Jean-Jacques Bourdin)

La question que l’on peut se poser est : sont-ce les problèmes économiques qui sont la cause des conflits ou sont-ce les difficultés ressenties par les personnes (conséquences des problèmes économiques mais aussi du ressenti individuel, de l’injustice ressentie et/ou réelle). En d’autres termes, est-ce le sentiment d’urgence vitale qui déclenche la guerre ou les problèmes économiques ?

Plus une situation oppresse, contraint, oblige à réagir, plus il est utile de prendre de la hauteur (physiquement et conceptuellement).

Il n’y a pas de solution miracle aux conflits, seulement aujourd’hui les réponses apportées sont toutes de nature à entretenir les conflits, à les gérer, à les contenir, les tenir sous cloches. Passons à une stratégie de résolution des conflits, des réponses pérennes, durables.

Utopique ou inimaginable ?

Ce qui parait utopique est en fait une façon de voir les choses différemment.

Qu’a t’on à perdre à essayer ? Que risque t’on ? Une guerre, des conflits raciaux, des polémiques ? C’est déjà le cas. Au pire, les résultats pourraient ne pas être meilleurs, au mieux… je vous laisse imaginer.

La stratégie de démonstration de force face à un adversaire présumé, pressenti comme tel, implique une surenchère, par défis d’abord, par méfiance ensuite, par obligation (ou par motivation ressentie comme telle) quand le conflit est là.

La stratégie de démonstration de force est l’aboutissement du légalisme à outrance, du droit et de la morale sanctificatrice ou vengeresse, c’est selon.

Le droit, la justice, les lois, sont des outils, que l’on met au service de la paix ou de la guerre en fonction des situations.

Au delà du constat et de la critique

Se plaindre ne suffit pas à changer ce qui est, quelles solutions, prémices de solutions, pistes la médiation professionnelle peut elle apporter.

  • Les trois passoires de Socrate semblent le premier outil au service d’un accord. Les faits.
  • L’usage de la raison pourrait être un deuxième outil, Descartes ne me contredirait sans doute pas, du traité des passions au Discours de la méthode, le chemin vers l’analyse factuelle des faits et des conséquences est là.
  • Après l’utilisation des deux premiers outils nous pouvons mettre en oeuvre le troisième outil qui requiert une implication de votre part. Vous avez séparé le bon grain de l’ivraie avec le premier outil, vous avez construit un raisonnement logique avec le deuxième outil, il est temps d’imaginer la suite et de construire un projet, des projets.

L’imagination non censurée, un outil qui permet de trouver des solutions jusque là cachées. L’imagination permet de mettre à jour des possibilités sans préjuger de leur pertinence ou de leur faisabilité. Une fois répertoriées les possibilités non censurées, votre raison va de nouveau permettre de discriminer les solutions faisables et souhaitables des solutions plus approximatives.

La confiance. C’est bien quand la confiance réciproque règne que tous ces outils sont efficaces. Comment revenir à cette confiance, seul ou par l’accompagnement d’une personne neutre, indépendante et impartiale formée à la qualité relationnelle.

C’est par la confiance que ce qui parait aujourd’hui être le théâtre immuable de la violence se transformera en théâtre temporaire des confrontations d’idées d’où naîtront les projets durables, faisables et souhaitables. Et parce que vous avez cheminé vers la médiation vous avez conscience que les faux pas relationnels ne sont pas le fait de personnes mauvaises, avec la volonté de nuire, mais bien de personnes qui, comme vous, ont les idées parfois embuées par les émotions à cause des motivations qui sont propres. Et parfois souillées par la crainte. Parce que vous avez fait pris connaissance et que vous avez intégré ces errements relationnels inhérents à l’humanité, vous avez prévu le recours à un tiers pour vous permettre de revenir sur le terrain rationnel sans glisser dans les fossés.

La qualité relationnelle comme levier de développement durable des relations (sociales, nationales, internationales, individuelles)

C’est une évidence et pourtant, malgré tous les efforts que chacun fait, les décisions prises sur les difficultés rencontrées sont plus souvent :

– en défense de ce qui était LA solution dans un contexte qui n’est plus

– en réaction à ce que l’on considère être un danger

plutôt qu’une promotion de solutions qui résultent de l’analyse des événements, pour une solution durable dans le temps.

Comment faire ?

Il n’y pas de solution toute faite mais des façons d’y parvenir. Les compétences relationnelles sont primordiales dans un monde où les accords internationaux sont le fruit de discussions, de tractations, de la rencontre de personnes. Alors, former ces personnes, oui certainement, mais nous l’avons vu, avoir un intérêt à trouver une solution plutôt qu’une autre ne permet plus de conduire les discussions en toute neutralité. Mettre en place un réseau de médiateurs professionnels dont l’éthique et la déontologie assure l’indépendance, la neutralité et l’impartialité ?

On en discute !

Pour tous ces conflits il est possible de mettre en oeuvre ce qui est vrai pour les individus à toutes les échelles, il suffit d’intervenir au bon échelon. Et c’est peut être là que l’on peut reparler d’un statut pour les médiateurs proche de celui du statut de journaliste pour assurer l’indépendance, la neutralité et l’impartialité. Mais ce sujet pourrait faire, à lui seul, l’objet d’un article.

La médiation professionnelle, ce n’est pas seulement la résolution des conflits, c’est la mise en place du terreau (la confiance) qui permet de faire grandir les projets de manière durable.

 

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Fabien Eon
Fabien Eon
9 années plus tôt

Tu cites Jacques Attali, qui a fait la promotion de la guerre en Libye (« Libye, il est temps d’intervenir » sur son site Slate.fr) avec les conséquences désastreuses que l’on observe.

Ces derniers temps, il tire à boulets rouges sur Vladimir Poutine (« Vladimir Ier, tsar de Russie » ou « Ukraine: l’économie russe nous épargnera-t-elle une guerre ouverte? »)

Comme tu le dis, les solutions de ceux qui proposent un regard aussi manichéen sur le monde ne peuvent qu’entretenir les conflits…