La médiation entre dans les textes de la procédure prud’homale. Le Décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a fait de la médiation un instrument possible au gré du tribunal. Il est pris en application de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite Macron. Ainsi, tout différend créé dans le cadre d’un contrat de travail peut faire l’objet d’une médiation, l’article 24 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 qui la limitait aux différends transfrontaliers, aberration inégalitaire que j’ai eu l’occasion de railler ici et ailleurs, étant abrogé.
Le texte
« Titre VII
« RÉSOLUTION AMIABLE DES DIFFÉRENDS
« Art. R. 1471-2. Le bureau de conciliation et d’orientation ou le bureau de jugement peut, quel que soit le stade de la procédure :
« 1° Après avoir recueilli l’accord des parties, désigner un médiateur afin de les entendre et de confronter leurs points de vue pour permettre de trouver une solution au litige qui les oppose ;
« 2° Enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur qui les informe sur l’objet et le déroulement de la mesure.
« L’accord est homologué, selon le cas, par le bureau de conciliation et d’orientation ou le bureau de jugement. »
Maintenant, au delà de ces textes officiels, vous allez entrer dans une approche que vous ne connaissez pas forcément : la médiation professionnelle. Cette approche est celle d’un changement de paradigme. Elle bouscule les marques habituelles, parfois si fortement qu’elles peut provoquer un rejet de la démarche, parce qu’elle se fonde sur une autre manière d’envisager les relations et donc d’aborder la résolution des différends. Néanmoins, avec les avancées de la médiation en matière judiciaire, les personnes peuvent bénéficier d’une instrumentation performante pour résoudre leurs conflits. Alors pas de précipitation, c’est une autre voie, qui en conséquence ne peut qu’être « provocatrice » – « entrainer sur une autre voie« …
Contexte d’application des dispositions légales sur la médiation prud’homale
Aux Prud’hommes, les juges et conseillers doivent savoir comment utiliser le recours à la médiation dont ils ont en main la lourde responsabilité de préserver chez leurs concitoyens la libre décision. La médiation étant pratiquée de manière très amateure, ses résultats ont toujours été peu concluant et n’encouragent pas les professionnels du contentieux à orienter les protagonistes d’un différend à aller en médiation dans les cas disons les plus enflammés. Et pourtant, c’est dans ce genre de cas qu’il faut recommander la médiation. Mais quelle médiation ? La médiation professionnelle telle qu’elle est pratiquée exclusivement par les membres de l’organisation syndicale des médiateurs professionnels.
Ainsi, lorsqu’un différend est fondé sur des aspects négociables, avec des personnes accessibles à l’injonction d’apaisement, l’espace conciliateur ou le discours invitant au raisonnable peut être de mise. La médiation conventionnelle, mettant en œuvre les éléments du rappel à la loi, à la norme, aux principes moraux, à la bienveillance et à la tolérance, avec des attitudes empathiques éventuelles de la part du tiers faisant office de médiateur, cette forme de médiation là peut permettre de poser les choses et de déboucher sur un accord. Mais, soyons clair, cette forme de médiation n’est en rien professionnelle.
Lorsque l’émotion est si forte, les ressentis si aigus que le discours et l’écoute du tiers n’y font rien, alors la médiation professionnelle, discipline développée exclusivement par les médiateurs professionnels répondant aux exigences de l’éthique et de la déontologie du CODEOME s’impose. Il s’agit d’une aide à la structuration de la pensée, un accompagnement à la prise de décision, qui permet aux personnes de se sortir d’un différend qui a pris le pas sur le libre arbitre.
Pourquoi la médiation professionnelle et pas une autre ?
La médiation professionnelle est une pratique dont le cœur de la discipline n’est pas le conflit, c’est la raison pour laquelle elle fonctionne. Prendre comme référentiel le conflit, c’est ne pas pouvoir en sortir. Le référentiel du médiateur professionnel est la qualité relationnelle, très précisément, bien identifié, dans ses aspects les plus méthodologiques. Quand on n’a que le conflit comme paradigme, le conflit est entretenu. Il apparaît comme une fatalité, une donnée indéracinable. Dans un tel cas, tout au mieux, on fait de la gestion des conflits. Avec la médiation professionnelle, il est inévitable d’aller vers une autre recherche, celle de la qualité des relations. Le médiateur professionnel ne saurait s’arrêter à un accord, mais il conduit nécessairement dans une construction de projet.
Ainsi, la médiation professionnelle est une discipline pratiquée par les seuls médiateurs membres de la CPMN. Ils ont une formation rigoureuse qui exclut amateurisme et dilettantisme, et l’exigence d’entretenir leur instrumentation rationnelle.
Le rendez-vous cette année est au mois d’octobre, sur la thématique du dialogue social, les 20 et 21 octobre, au Symposium à Lyon, après un tour de France et des Caraïbes.