La responsabilité professionnelle des médiateurs … professionnels

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Dans quelles circonstances la responsabilité d’un médiateur intervenant dans des relations conflictuelles pourrait être mise en cause ? Un avocat québécois, Jean H. Gagnon, s’est lancé dans l’exercice délicat, voire polémique, de l’identification des situations où la responsabilité professionnelle des médiateurs pourrait être mise en cause. Il est question de préserver la confidentialité tout en ayant une définition quelque peu équivoque de cette garantie en médiation. Evidemment, le sujet n’est pas simple. La responsabilité professionnelle du médiateur, explique l’avocat québécois, pourrait être mise à l’épreuve lors d’entretiens privés – les fameux « caucus » – avec la révélation de confidences dont l’absence de connaissance pourrait conduire la partie adverse à une décision qui nuirait à ses intérêts. Et c’est là que commence une confusion. Selon le juriste, le médiateur tenu par la confidentialité serait alors complice d’un dol, en raison d’un accord qu’il laisserait signer sans informer un protagoniste berné qui découvrirait ensuite le pot aux roses. Accessoirement, on se demande comment la victime apporterait la preuve de ce que le médiateur pourrait avoir été informé. Poursuivant son article, l’auteur pointe des conflits d’intérêts non divulgués, des pressions exercées par le médiateur et l’incapacité de décider de l’une des parties que le médiateur aurait connue sans en tenir compte. Ca fait beaucoup, mais en réalité, ça ne fait rien. Le propos peut sembler complet, mais la vertu théorique ne répond pas aux exigences de la pratique. On perçoit clairement la confusion des rôles entre médiateur et arbitre, un manque de référentiel pour exercer avec compétence la profession de médiateur. L’arbitrage ne se combine pas avec la médiation professionnelle. Cette médiation présentée par Jean H. Gagnon est une médiation qui ne sort pas des habitudes des prétoires. Elle n’apporte rien de nouveau par rapport à la conciliation. Elle fonctionne d’une manière similaire au système judiciaire.

Je reviens donc sur cet article qui fait le tour des études, cabinets, bureaux et chaumières pour aider à faire un tri salutaire.

D’abord, pour poursuivre l’examen de cet article, il convient d’avoir en toile de fond quelques éléments d’information et de réflexions.

  1. En bref, depuis 2001, la CPMN affirme la profession de médiateur. Elle promeut la « médiation professionnelle » et depuis 2012 le « droit à la médiation ». Côté Canada, l’IMAQ a puisé son code d’éthique et de déontologie dans celui de la CPMN, le CODEOME. Lors de la découverte de cette indélicatesse, l’explication fournie était que c’était l’oeuvre inconséquente d’un stagiaire, mais depuis rien n’a changé. Sans demande express ni plus d’attention, cette organisation d’Outre-Atlantique, a transformé le travail sur l’éthique et la déontologie de la CPMN pour la nouvelle profession, en une activité soumise à des notions de droit et des représentations morales au jouant de la notion très personnelle d’équité. Des amalgames et des confusions sont mêlées dans le texte initial.
  2. Plus précisément, sur la discussion, la notion de confidentialité est différente selon que le médiateur est défini dans la pratique de Jean H. Gagnon ou médiateur professionnel, tel que défini par la CPMN. Jean H. Gagnon associe le médiateur à un confesseur. Il en déduit qu’une confession doit être tenue confidentielle et fait en boucle l’amalgame entre confidence et confidentialité. A la CPMN, le médiateur professionnel est tenu par une stricte confidentialité vis-à-vis de l’extérieur de la médiation et il ne saurait y avoir de confidence que dès lors que celle-ci n’interfère pas sur l’impartialité du médiateur et en conséquence ne compromet pas la conclusion d’un accord pérenne. Le médiateur professionnel n’est donc pas cet amateur qui deviendrait otage de son incompétence.
  3. Plus largement, les questions d’impartialité, de neutralité et d’indépendance sont clairement définies côté CPMN et très floutée chez l’auteur de l’article. Je renvoie mes lecteurs vers un dossier spécifique où j’ai illustré les trois fondamentaux de la posture de distanciation.
  4. Le propos de Jean H. Gagnon ne présente aucun cas concret. On reste sur une théorie convenue. Côté CPMN, il est tout à fait intégré que le mensonge fait partie du conflit et que le médiateur professionnel doit savoir comment y faire face. Il est naturellement abordé en formation initiale.

On peut quand même poursuivre un peu plus avant pour clarifier ce qu’il en est de la responsabilité d’un médiateur professionnel. Attention, petite distinction : la médiation peut être rémunérée ou pas. Dans le premier cas, il ne s’agit pas d’un exercice professionnel, en conséquence l’assurance ne saurait être de mise pour une intervention bénévole. Dans le cas de rémunération, le médiateur est un prestataire de services, il doit donc être assuré. C’est même indiscutable.

Evidemment, sa responsabilité peut être mise en cause pour tout et n’importe quoi, c’est la raison pour laquelle, dès 2001, la CPMN a été la première organisation professionnelle à négocier une assurance pour ses membres. Pourtant, il est à noter qu’après plus de quinze ans de pratique, aucun recours n’est venu justifier une augmentation des cotisations des membres de la CPMN. Nous en sommes annuellement toujours à 100€.

Ainsi, cette discussion emprunt de juridisme pourrait rendre fébrile , mais ne traite-t-elle pas que de cas d’école ? Dans tout cela, il me semble plus pertinent de rechercher la responsabilité des médiateurs dans l’incompétence manifeste… En tout cas, il convient bien que les médiateurs professionnels témoignent de cette exigence d’une formation permanente qui fait que la CPMN peut affirmer son slogan : un médiateur, une mission, un résultat, sachant que les issues d’une médiation leurs sont connues.

Rendez-vous au Symposium des 20 et 21 octobre à Lyon. L’année prochaine, c’est Lille et il sera précisément question de l’évolution de notre profession.

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BEDUBOURG
BEDUBOURG
6 années plus tôt

De qui dépend le médiateur de la mairie à Perpignan au Bas Vernet ?