De l’indifférence dans les palais de justice

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L’indifférence s’est propagée dans notre société. Dans les environnements où l’individualisation est pourtant le principe, l’indifférence s’est enracinée. Elle s’écoule dans les rouages du système judiciaire. Nous ne pouvons dès lors plus nous étonner du manque de confiance que les citoyens, les « justiciables » peuvent ressentir à l’égard de la « Justice ».

Le 16 mai 2019, dans l’enceinte du Tribunal de Grande Instance de Paris, une avocate a été évacuée par des policiers sur ordre d’une magistrate. « En aucun cas, il ne peut être recouru au concours des forces de l’ordre, à l’égard d’un avocat, dans l’exercice de ses fonctions » déclara le président du TGI de Paris sous la forme d’un sévère rappel à l’ordre, prenant acte de l’émotion suscitée au sein de l’ensemble du Barreau.

Nous lirons avec stupéfaction que certains avocats déclarèrent que cette expulsion « est un événement qui dépasse tout, qui va bien au-delà de toutes les petites humiliations quotidiennes infligées à la défense«  – comme si ces « humiliations quotidiennes » constituaient une routine tout à fait acceptable !

Les altercations sont hélas nombreuses, et ce, dans beaucoup de prétoires Paris ou la Province…

Or, comment cela se peut-il, dans un monde pourtant formé à la gestion de conflits et de crises en tous genres ? et si ce monde issu directement du contrat social ignorait tout de ce qu’était l’entente sociale et les relations humaines…

Et si toute cette violence et ce mépris venaient du fait d’être Indifférent à autrui ? penchons-nous de plus près sur cette notion… l’indifférence est quelque chose dont on ne se rend pas compte car en définitive on ne sait pas que l’on vit dans l’ignorance d’autrui. Qui n’a pas pensé, dit ou entendu : «je m’en fiche ! je m’en fous ! çà ne me fait rien ! » ; Or, inévitablement, à un moment donné, il va se passer une intéraction qui va faire plus ou moins prendre conscience que l’autre existe ! et quand cet autre va être plus présent, plus existant, celui qui aura dit « je m’en fous », aura un choix : soit gérer le conflit -et souvent très mal-, soit se dire « et si ma raison était là ? je vais reconnaître l’Autre en tant qu’il est l’Autre » ; opter pour la seconde solution sera un choix non plus d’adversité comme nous en avons l’habitude, mais d’altérité, chère aux Médiateurs Professionnels.

L'indifférence et la considération

Ce qui détruit le monde

Reconnaître l’autre en tant qu’il est l’Autre et reconnaître que ce qu’il dit doit être entendu et pris bien au-delà de la considération, ne pensez-vous pas que c’est ce qui est attendu d’un élu, d’un représentant quelconque dès lors qu’il est mandaté pour s’occuper de la vie de la société ?

Malheureusement, le mécanisme humain est tel qu’il n’y a pas cette spontanéité de reconnaissance de la légitimité des autres. Celui qui se trouve dans une position de pouvoir, va se pencher sur autrui et va tout au mieux, le prendre en considération. Vous me direz « c’est toujours çà ! » détrompez-vous ! sachez que dans le mot « considération » il y a « sidéral » signifiant « ce qui vient d’en-haut » et que lorsque l’on est en haut, on se penche… cette considération est pernicieuse en définitive ; pourquoi ?

Quand on prend autrui en considération, on pourra éventuellement se montrer bienveillant avec le risque que l’autre ne se montre pas respectueux comme on le voudrait. Dans ce cas, la bienveillance va se transformer en surveillance et si au final bienveillance et surveillance ne fonctionnent pas, on basculera dans la tolérance ; qui dit tolérance, dit seuil et si le seuil de la tolérance est franchi, celui qui est en position de pouvoir – sans en avoir conscience car suffisamment entretenu dans l’idée qu’il fait partie de l’élite sachant mieux que les autres- ne sait plus comment faire et use de tous les pouvoirs y compris celui de déconsidérer autrui, de mépriser, de le diaboliser et de là, tout un mécanisme d’adversité se mettra en œuvre détruisant le peu d’humanité existant dans cette piètre relation. S’en suivront de la morale, des lois, des interdictions, des sanctions réduisant bien des libertés…

Est-ce de cela que nous voulons ? est-ce de cela que vous voulez ?

Et si l’entente sociale était la solution dans le monde judiciaire, et plus largement dans notre société en profond mal-être…subir ou choisir, c’est en définitive vous qui décidez

Note rédigée avec le concours de Jean-Louis LASCOUX, fondateur de la Médiation Professionnelle