Film sur la médiation professionnelle : l’histoire interpelle, le processus séduit…

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Hier après-midi, 14 heures, hôtel Mercure de Bordeaux, salle Paramount. Projection du premier film sur la médiation professionnelle. Durée : une heure quinze. Trente personnes, sur quarante attendues : avocats, médiateurs, experts judiciaires, dirigeants de réseau d’entreprises, consultants, coachs, formateurs, dont quatre médiateurs professionnels. Les échanges conduisent jusqu’au cocktail terminé à 19 heures. Entre les échanges , Jérôme Messinguiral présente les concepts. Il explicite les sous-titrages du film. Le processus structuré et les techniques d’altérocentrage provoquent des discussions et des interrogations sur les attitudes et comportements efficaces des intervenants en médiation.

Plus largement, le public a été interpellé par la posture du médiateur professionnel. Il a découvert l’instrumentation de cette garantie de la libre expression et de sa posture de témoin de l’égalité des droits des parties. Il a constaté les différences entre une pratique intuitive et des processus laissés au bon sens et au feeling, et le processus structuré et professionnel qui leur a été présenté. Il a pu constater que le travail du médiateur professionnel est très éloigné de la pratique du conseil, de la démarche moralisatrice et de l’accompagnateur psychologique.

Précisément, pour l’EPMN Médiateurs Associés, il s’agit de faire connaître le processus structuré dispensé dans la formation de médiateur professionnel. Les questions que nous pouvons nous poser quant à l’impact du film pédagogique sur un public non averti a trouvé des réponses. Petit rappel : l’histoire est celle de la rupture entre deux associés d’un hôtel et d’un restaurant, ces deux associés étant également mariés. A moins qu’il ne s’agisse de la mésentente de deux époux ayant développé des activités professionnelles ? Chacun son point de vue de départ pour se lancer dans cette médiation. Chacun ses attentes et ses demandes. Les réactions et les représentations de chacun(e) s’y sont retrouvées. Les affects et les valeurs s’entrechoquent chez les spectateurs, néanmoins très attentifs au déroulement de la démarche proposée. Le système des sous-titres pédagogiques, très appréciés en formation, ont été des repères.

 

Une feuille d’évaluation présentait le séquençage du film. Une ligne attirait l’attention des spectateurs sur les interventions du médiateur. Les propos les plus tranchés ont traduit des courants de pensée identifiés dans la discipline de la médiation. Les positions moralisatrices très courantes ont compensé une sous-représentation du courant spiritualiste de la médiation. Trois types de critique :

* le médiateur devrait plus orienter les parties sur une recherche de pardon et de réconciliation pour sauver leur couple, plus que de sauver leur entreprise.

* le médiateur doit pousser les parties à sécuriser leur accord en leur disant de se rapprocher d’un juriste pour l’élaborer. Il doit être attentif à l’équité…

* il existe d’autres manières de conduire la médiation. Sans donner d’avis, l’émotionnel est à faire monter. Il faut pousser les gens. Si les gens sont trop coopérants, c’est qu’ils ne sont pas vraiment impliqués.

Le film a rapidement fait surgir quelques identifications. Les réactions ont permis de faire un ensemble de constats. Le commentaire le plus incrédule sur l’aboutissement de la médiation provient d’une personne qui n’a pas assisté aux entretiens de préparation des parties à la réunion. Il ressort que lorsque la motivation de s’impliquer dans la médiation provient d’une expérience personnelle conflictuelle, la posture professionnelle du médiateur est difficile à imaginer, voire contestée. Lorsque les personnes expriment un sentiment de légitimité pour faire de la médiation, le cheminement de la professionnalisation est hasardeux. Les personnes se positionnent en identification des « victimes ». Elles ne savent pas s’extraire. Elles contestent à partir de leurs propres difficultés les possibilités de changement des autres, enfermant autrui dans leurs propres souffrances, leurs représentations et solutions. Le même constat est fait en formation où les participants souhaitant devenir médiateur professionnel les mieux positionnés sont ceux qui ne présentent pas de perturbation affective.

Pour ce qui est du médiateur à proprement parler, le plus difficile pour les personnes est de concevoir une obligation de moyen avec une responsabilité professionnelle 100%. Que le médiateur soit responsable de la prise en charge du différend qui lui est soumis a été une découverte pour la plupart des participants.

Pour 90% des participants, le besoin de formation continue et de rigueur dans l’acquisition d’une posture de distanciation est clairement exprimé. Le besoin est plus clairement exprimé chez ceux qui revendiquent des expériences en médiation. Ceux qui ont suivi une formation à la médiation doivent d’abord dépasser un certain découragement face aux conséquences de la « contamination émotionnelle ». Indépendamment de leur implication émotionnelle, de nombreux participants ont exprimés que la maîtrise d’un processus professionnel peut permettre aux intervenants en médiation de se protéger des éclats affectifs auxquels ils se trouvent exposés.

Le film a été noté sur une échelle de 10 points. Il a reçu la note moyenne de 8,53. La plus mauvaise note : 7 ; la meilleure : 10. La note la plus fréquente est : 8.